Un pass sanitaire pour voyager ?
Depuis quelques semaines, on parle du pass sanitaire : un sésame pour rendre possible la reprise des voyages. Beaucoup de questions se posent sur sa mise en place et les réfractaires se font déjà entendre.
Aujourd’hui, je te propose de faire le point sur ce projet de pass sanitaire.
Le pass sanitaire, c’est quoi ?
Actuellement, on parle surtout de pass sanitaire pour désigner le projet de l’Union Européenne : une solution numérique pour faciliter les déplacements dans l’espace Schengen.
Le 17 mars, la Commission européenne a proposé l’idée d’un certificat vert numérique (ou digital green certificate) pour stocker des informations sur la situation sanitaire d’un usager. Le pass concernerait 3 points : la vaccination, l’immunisation et les résultats de tests négatifs.
Le point à noter, c’est que ce pass sanitaire ne concernera pas seulement le vaccin. Début mars, seulement 6% de la population européenne était déjà vaccinée. Des voix s’élèvent contre la discrimination à l’égard des non-vaccinés qui ne pourraient pas utiliser ce pass pour voyager.
L’idée est de mettre gratuitement à disposition cette solution pour tous les résidents européens. Le tourisme en Europe représente 27 millions d’emplois et 10% du PIB total de l’Union Européenne.
Le Commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, a affirmé l’objectif de mettre en place le certificat vert avant l’été. Les États membres ont déjà validé le digital green pass. Du 7 au 10 juin, le Parlement Européen doit se réunir pour annoncer une décision finale.
Le pass sanitaire : déjà présent à l’étranger
Début février, la Grèce et Israël ont conclu un accord autorisant leurs habitants à voyager entre les deux pays. Israël, dont 50% de la population est vaccinée, a aussi mis en place un passeport vert permettant aux vaccinés de retourner dans les restaurants, les cafés et les salles de spectacle.
La Suède ou le Danemark, ont aussi créé des certificats électroniques pour relancer les voyages. En Estonie ou en Islande, une simple attestation de vaccination permet d’éviter la quarantaine. En Chine, le passeport santé se trouve sur WeChat. Un QR code permet de justifier un test PCR ou son statut vaccinal pour voyager.
Derrière les problématiques sanitaires, c’est une véritable compétition industrielle qui se mène. Des entreprises comme Microsoft ou Oracle se retrouvent autour du collectif The Vaccine Credential Initiative pour développer un passeport vaccinal numérique.
À New York, l’Excelsior Pass permet de confirmer un test ou une vaccination pour accéder à certains lieux. Ce programme, développé par IBM, ressemble à une carte d’embarquement numérique et permet de confirmer son état de santé avec un QR code.
En France, le groupe ADP et Air France ont testé un pass sanitaire numérique sur les vols entre Paris et les Antilles. Sur l’application AOKpass, on peut retrouver son test négatif, certifié par un laboratoire partenaire. Le 15 mars, l’expérience a été étendue aux vols entre Paris, San Francisco et Los Angeles.
Pass sanitaire, vaccinal, culturel… En France ?
Cela fait déjà quelques mois qu’en France, on discute d’un « pass » permettant de retourner dans les cafés, restaurants et lieux culturels. Ce projet pose des questions en termes de libertés et de protection des données personnelles.
Olivier Véran affirme vouloir miser sur la vaccination plutôt que sur le pass. Emmanuel Macron a annoncé qu’un projet était en réflexion via la plateforme TousAntiCOVID, mais qu’il ne reposerait pas sur la vaccination.
TousAntiCOVID-Carnet est un projet testé sur certains vols à destination de la Corse ou de l’Outre-Mer. Il s’agirait de stocker les résultats négatifs des tests PCR ou antigéniques afin d’accéder à certains vols. À l’avenir, il devrait être possible de retrouver son certificat de vaccination dans l’application.
Il est trop tôt pour savoir si ce dispositif servira à filtrer les visiteurs dans les lieux publics. Le 1er avril, le ministre de la santé a répété qu’il souhaitait que ces endroits rouvrent pour tous. La plateforme servira probablement à tracer les cas contacts grâce à un QR Code à l’entrée de certains lieux.
Les débats autour du pass sanitaire
Qu’il s’agisse du projet de l’Union Européenne ou de la France, des questions se posent autour de la protection des données. Les États doivent garantir que les informations récoltées ne serviront qu’à informer sur l’état de santé dans le cadre de la lutte contre le COVID-19.
Ces dispositifs ne doivent pas non plus faire oublier qu’une grande majorité de l’Europe n’est pas encore vaccinée. L’OMS a exprimé ses doutes sur une solution qui reposerait sur une preuve de vaccination, alors qu’il existe encore « trop d’inconnues fondamentales en termes d’efficacité des vaccins pour réduire la transmission du virus. »
Le 15 avril, le comité d’urgence de l’OMS recommandait de ne pas exiger une preuve de vaccination comme condition d’entrée dans un pays. Surtout s’il s’agit de ne plus respecter les autres mesures de en place sur le territoire pour freiner le virus.
La Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe a envoyé le 31 mars un document dans lequel elle rappelle aux gouvernements les normes en matière de respect des droits de l’homme. Elle insiste sur l’importance d’administrer les vaccins équitablement, ainsi que sur la protection des données personnelles dans le cadre d’un pass sanitaire.
Qu’en pensent les Français ?
En France, c’est la CNIL qui s’est exprimée sur la nouvelle fonctionnalité de TousAntiCOVID. Dans ses recommandations, elle rappelle que le volontariat est essentiel. Le dispositif ne doit pas conditionner la libre circulation mais seulement « favoriser les déplacements nécessitant un contrôle sanitaire ».
Une étude de Censuswide montre que 91% des Français n’hésiteraient pas à utiliser un passeport sanitaire numérique pour leurs voyages. Ils sont 81% à soutenir l’initiative si elle permet de relancer le tourisme. 44% d’entre eux sont à l’aise à condition que le pass contienne seulement des données relatives au COVID-19.
De nombreuses questions juridiques et sociales entourent ces dispositifs en Europe ou en France. Les prochaines semaines seront décisives pour préciser ces projets et apercevoir des opportunités pour un retour à la vie normale.
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