La culture face au COVID-19
Cela fait quasiment un an que le monde culturel doit faire face aux différentes restrictions imposées par la pandémie.
Quelles sont les véritables conséquences du COVID-19 sur la culture ? Comment le secteur peut-il s’en sortir en France et dans le monde ? Quelles sont les perspectives pour les mois, les années à venir ?
Le tourisme culturel en forte baisse
Dans le monde, l’industrie culturelle et créative a généré 2 milliards de dollars et employé 29 millions de personnes en 2013. Pourtant, la pandémie a mis à mal le secteur et plongé ses acteurs dans une grande précarité.
Aux États-Unis, 2,7 millions d’emplois dans le secteur culturel ont été supprimés en 2020. 95% des musées dans le monde entier ont fermés leurs portes pendant la pandémie. 13% d’entre eux pourraient ne jamais rouvrir. Le tourisme culturel représente pourtant 40% des recettes du tourisme mondial.
Certains sites culturels dépendent des visites pour leur conservation. Avec la pandémie, leur survie est donc compromise. On remarque aussi une hausse des vols et activités illégales sur les sites du patrimoine naturel.
En France, les musées ont également connu une grande baisse de visites. Le Louvre a fait 72% d’entrées en moins et a perdu 90 millions d’euros de recettes. Le Musée d’Orsay et le Musée de l’Orangerie ont vu leurs visites baisser de 77%, le Château de Versailles de 75%.
La culture française menacée
En France, la culture représente 2,3% de l’économie, environ 80 000 entreprises et 630 000 emplois. Une étude du Ministère de la Culture montre une perte de 22,3 milliards d’euros en 2020. 46% des travailleurs ont été au chômage partiel. C’est le deuxième secteur le plus touché après l’aérien.
Le monde du spectacle est le plus impacté avec une baisse du chiffre d’affaires de 72%, soit 4,2 millions d’euros. Le cinéma a enregistré une baisse de 42% et les librairies de 24%. Entre avril et août, 4 000 festivals ont été annulés. On estime leurs pertes à 2,6 milliards d’euros.
D’après l’UNESCO, le cinéma mondial a perdu 10 millions d’emplois en 2020. D’après le CNC, la fréquentation française des cinémas a baissé de presque 70% en 2020. En janvier 2021, on estime que 300 films sont en attente de sortie.
Un tiers des galeries d’art a réduit son personnel de 50%. Une fermeture de 6 mois coûte environ 10 milliards de dollars à l’industrie musicale. Le marché de l’édition devrait diminuer de 7,5%.
Le ras-le-bol du secteur culturel
Depuis la fermeture des lieux culturels, de nombreuses voix se font entendre pour réclamer des mesures de la part du gouvernement. L’été est attendu avec impatience, car une réouverture des salles de spectacles pourrait palier à la souffrance du secteur.
En janvier, une manifestation a eu lieu à Paris pour demander la reprise de l’activité. Les acteurs de la culture se sont réunis pour protester contre des « décisions absurdes de fermeture » et demander à préparer le monde d’après.
Une vingtaine d’organismes a lancé le mouvement « Rebranchons la culture » dans l’espoir de recevoir un calendrier précis. Julie Gayet s’est exprimée dans une tribune co-signée par 800 personnalités du cinéma français. Ils appellent le gouvernement à communiquer des règles sanitaires permettant aux espaces culturels de reprendre leur activité.
En mars, 250 personnes se sont retrouvées à Rouen pour demander la prolongation de l’année blanche pour le chômage ou encore un plan de financement pour soutenir les entreprises du spectacle. En septembre 2020, le gouvernement annonçait 2 milliards d’euros d’aides au secteur, notamment pour aider les établissements patrimoniaux.
La gestion du COVID-19 à l’étranger
Si 81% des Français se disent touchés par la fermeture des théâtres, concerts, musées et cinémas, c’est aussi car les mesures gouvernementales sont comparées à celles d’autres pays.
En Australie, l’un des territoires les moins affectés par la pandémie, les lieux culturels sont rouverts depuis plusieurs mois. À Melbourne, la capacité d’accueil est élevée à 75% et le masque n’est pas obligatoire. À Sydney, les bars et boites de nuit accueillent le public à 100%. Il suffit de flasher un QR code pour renseigner ses coordonnées et faciliter le traçage.
Au Québec, les activités culturelles reprennent progressivement, alors que la région compte environ 1000 cas par jour en moyenne. Le couvre-feu est maintenu à 21h30, mais les espaces culturels peuvent accueillir 250 personnes avec masque et distanciation sociale.
À Taïwan, la situation est revenue quasiment à la normale avec théâtres, cinémas et boites de nuits ouverts. L’archipel a géré la pandémie avec une quarantaine imposée à l’entrée du pays. En mars, un festival de musique a eu lieu avec 25 000 visiteurs. Les règles étaient strictes : masques, prise de température et collecte des coordonnées pour retracer les cas.
Des concerts-tests en France ?
Pour préparer la reprise, l’une des solutions annoncées par le gouvernement était l’organisation de concerts-tests à Paris et Marseille. Prévus pour la mi-mars, ces expériences n’ont pas encore eu lieu et devraient être repoussées au mois de mai.
Une expérience similaire a eu lieu à Barcelone. Un concert s’est tenu au Palau de San Jordi, avec un public debout sans distance de sécurité. Les participants ont été testés avant et après le concert, ils devaient porter un masque et rester dans une zone définie avec accès à un bar et des toilettes pour éviter les déplacements.
À Paris, le concert devrait se dérouler à l’Accord Arena avec 5000 spectateurs non-vaccinés. L’idée est de rassembler un public debout, sans distanciation, testé 72h avant l’évènement. Des caméras vérifieront le port du masque et les participants seront invités à télécharger l’application TousAntiCOVID pour faciliter le traçage.
Le Ministère de la Culture a annoncé son projet d’organiser des festivals à l’été 2021, dans une limite de 5000 spectateurs, assis. De nombreux festivals ont annulés leur édition à la suite de cette annonce, comme le Beauregard ou le Main Square.
Ces concerts-tests pourraient constituer un espoir pour une possible réouverture des salles. Cependant, leur organisation a déjà été repoussée deux fois, notamment à cause des mesures de confinement annoncées en mars.
Vers un pass sanitaire ?
La question du pass sanitaire a été évoquée par Emmanuel Macron comme une solution pour accélérer la reprise. L’idée serait d’autoriser l’accès à certains lieux comme des musées ou des salles de spectacle aux personnes vaccinées ou à minima testées négatives.
Cette question fait débat car elle soulève de nombreuses questions. Quelle forme prendrait ce pass ? Qui y aurait accès ? Quelles serait les sanctions pour non-respect de cette mesure ? Selon un sondage d’Elabe effectué début mars, 52% des Français s’opposent à un « pass sanitaire octroyant l’accès à certains lieux publics selon la situation médicale. »
Lors de l’allocution du 31 mars, Emmanuel Macron évoquait une réouverture des lieux culturels à la mi-mai. Le gouvernement semble miser sur la vaccination de la population plutôt que la mise en place d’un pass sanitaire pour garantir la reprise.
Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a précisé les pistes de réouverture : des jauges réduites, des prises de rendez-vous, un référent COVID pour garantir le respect des gestes barrières…
En avril, le Sénat a recommandé un redémarrage sur mesure à la fin du confinement. Les musées, cinémas et salles de spectacle pourraient être autorisés à rouvrir de manière progressive selon l’estimation du risque. Il a également affirmé que la jauge maintenue à 5000 personnes ne reposait sur aucun fondement scientifique.
Quel espoir pour la culture en France ?
Le secteur culturel est encore dans l’attente de mesures communiquées clairement par le gouvernement concernant une possible réouverture. Pour le moment, chacun y va de sa propre analyse et il paraît compliqué d’estimer une date précise de reprise.
En attendant, le secteur culturel redouble d’initiatives pour continuer à exister. La chaîne éphémère lancée par France Télévisions sur la TNT, Culture Box, a par exemple été prolongée. Elle permet d’accéder à des retransmissions de concerts, spectacles et festivals.
Face au flou auquel est confronté le monde de la culture, le mieux est encore de continuer à s’adapter en espérant voir arriver de véritables changements dans les prochaines semaines.
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