Faut qu'on parle

Syndromes et autres troubles du voyage

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Photo by Hudson Hintze on Unsplash

On associe souvent le voyage à la découverte, l’aventure, la détente… Bref, que du positif. Pourtant, il arrive que le voyage fasse mal (et je ne parle pas de jet lag).

On définit comme syndrome un ensemble de symptômes présentés par un patient dans des circonstances anormales et qui ne relèvent pas d’une pathologie. En bref, un syndrome c’est quand tu vas mal pour une raison difficile à définir mais qui n’a rien à voir avec un rhume, un cancer ou une gastro.

Le voyage connaît ses propres syndromes, parfois étonnants : je te propose de les découvrir.

 

Syndrome de Paris : idéalisation et déception

 

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Photo by Hannes Wolf on Unsplash

La capitale préférée de ce blog donne son nom à un syndrome découvert par le psychiatre Hiroaki Ōta en 1986. Il décrit un phénomène vécu essentiellement par des touristes japonais à Paris. Il s’agit de symptômes physiques (tachycardie, vertiges) et psychologiques (hallucinations, anxiété). Ce mal, pouvant aller jusqu’à la dépression, est soi-disant causé par la différence entre les attentes du voyageur et la réalité sur place.

L’image de Paris, c’est le romantisme, le luxe, l’élégance… Mais la réalité, c’est une ville bruyante, agitée et composée à 50% de pigeons. Le contraste entre la capitale et le décor d’Amélie Poulain est parfois dur à vivre. C’est en partie dû au fait que le Japon et la France ont des cultures très différentes (le Syndrome de Tokyo existe aussi). Les règles de politesse ou le rapport avec les autres sont des fossés qui peuvent compliquer l’intégration des japonais.

On parle plus généralement du Syndrome du Voyageur. Lors de séjours à l’étranger, il arrive que le contraste entre fantasme et réalité soit trop grand pour être supporté. Il s’agit souvent d’un trouble passager, qui disparaît quand le voyageur rentre chez lui.

La France est particulièrement touchée car il s’agit d’une destination populaire souvent idéalisée. Notre pays possède même l’attraction touristique la plus décevante du monde. Pourtant, le syndrome est mis en doute par la communauté psychiatrique. Un visiteur qui a déjà des troubles mentaux est plus fragile lors de son voyage. Et dans ce cas, il est difficile d’établir le lien entre la destination et son mal-être.

Dans le même genre, il existe le Syndrome Insulaire, ou Choc de Robinson, qui touche les voyageurs des îles. Imaginée comme paradisiaque, la destination finit par choquer par sa normalité ou son climat moins clément que prévu. Pour les expatriés, la découverte d’un marché du travail saturé et du coût de la vie élevé peut être à l’origine d’une vraie désillusion. Là encore, le syndrome tend à disparaître dès le départ.

 

Syndrome de Stendhal : la beauté qui fait mal

 

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Photo by Joshua Earle on Unsplash

Le Syndrome de Stendhal, aussi appelé le Syndrome de Florence, vient de la description de l’auteur d’une sensation inexplicable lors de son voyage en Italie, face aux œuvres de la Basilique de Santa Croce. Il écrit : « J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les beaux-arts et les sentiments passionnés. »

Après avoir admiré ces œuvres, Stendhal décrit un état d’extase et d’angoisse, une panique, presque une perte de connaissance. Ce trouble, très rare, a déjà été ressenti par d’autres voyageurs qui ont prétendu connaître une surcharge d’émotions face à une trop grande beauté. En clair, ils ont été littéralement retournés par des œuvres d’art.

Certains témoignages font lieu de visiteurs qui, pris de délire, tentent de voler ou de détruire les œuvres. Si on appelle ce phénomène Syndrome de Florence, c’est car la ville d’Italie semble particulièrement touchée. C’est comme si le touriste se retrouvait face à une idole. S’il s’agit d’une œuvre dont il a entendu toutes les louanges, il se peut que face à tant de beauté, il pète les plombs.

Là encore, ce trouble n’est pas reconnu par les psys et semble toucher des personnes ayant déjà une certaine fragilité. Pourtant, ce syndrome concerne surtout des européens (les Italiens seraient immunisés), à la culture commune qui leur offre une sensibilité permettant de comprendre toutes les subtilités de l’œuvre.

 

Syndrome de Jérusalem : voyage sain(t)

 

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Photo by Robert Bye on Unsplash

Des réactions étranges ont été remarquées de la part de certains touristes lors de visites de lieux saints. À Jérusalem, c’est environ 40 personnes qui sont hospitalisées chaque année pour cause de délire.

Le visiteur souffrant du syndrome choisit alors de s’isoler de son groupe, se nettoie plus que de raison par obsession de la pureté et finit par se draper d’une toge (parfois fabriquée avec les draps de l’hôtel) pour aller déclamer des versets dans les lieux saints, persuadé d’être le Messie.

Cette attitude plutôt étonnante s’explique en partie par l’aura religieuse de la destination. En moyenne, environ 2/3 des touristes sont de confession juive et le tiers restant est chrétien. La ville peut apparaître comme trop moderne par rapport aux attentes des plus pieux et, pour pallier cette surprise, certains ont une réaction disproportionnée et se prennent pour un personnage de la Bible ayant pour mission de prêcher la bonne parole.

Là encore, certains voyageurs sont déjà malades avant de partir. Parfois, l’obsession religieuse est même ce qui déclenche le voyage. Le changement des habitudes peut également accentuer une forme de solitude et agir sur la santé mentale.

Enfin, on peut considérer le Syndrome de Jérusalem et celui de Stendhal comme similaires. Le trop plein d’émotion prend sa source dans l’admiration de la beauté ou une mysticité trop dure à supporter.

 

Syndrome de l’Inde : le vrai choc des cultures

 

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Photo by Ibrahim Rifath on Unsplash

Une autre destination riche en symbolisme est l’Inde. Pour les occidentaux, le pays peut être une sorte d’Eldorado, l’endroit rêvé pour un voyage initiatique à la Mange, Prie, Aime. Mais souvent, les choses se passent souvent différemment.

Derrière le fantasme se cache la réalité : un pays pauvre, très peuplé, aux coutumes différentes de tout ce à quoi le voyageur occidental est habitué. Si certains tombent amoureux de l’Inde, d’autres ont au contraire beaucoup de mal à gérer le choc des cultures.

Perte de repères, angoisse, parano ou un état de panique constant : certains touristes sont persuadés d’être la cible d’un danger et refusent de quitter leur chambre d’hôtel. Le mélange entre la spiritualité, le sentiment d’insécurité et la foule peut provoquer des réactions, une fois encore, disproportionnées.

L’Inde est également un pays où des personnes souffrant de troubles mentaux trouvent leur foyer. L’auteur Régis Airault se demandait : « L’Inde rend-t-elle fou ou les fous vont-ils en Inde ? » Dans les années 80, un serial killer franco-indien tuait des touristes en Inde. Autre exemple : une femme qui se sentait si mal qu’elle a tenté de rejoindre son pays en se jetant dans l’Océan et a manqué de finir noyée. L’Inde est le seul pays où le Consulat français possède une équipe psychiatrique et celle-ci gère environ 6 cas de ce genre par an.

Face à la perte d’identité et l’impression de ne pas être à sa place, une solution peut être de se raccrocher ce qui évoque sa propre culture. Des odeurs ou des sons familiers, une langue ou une musique connue. Et si comme toujours, les symptômes semblent disparaître à la fin du voyage, il arrive que certains ne s’en remettent pas.

 

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Photo by Pablo García Saldaña on Unsplash

Face à tous ces exemples, parfois effrayants, il convient de rééquilibrer un peu le propos. Rappelons-nous que le voyage représente un stress, qui peut révéler ou aggraver une anxiété déjà présente.

Si tout voyage peut remettre en cause notre vision des choses (surtout s’il a lieu dans un pays avec une culture différente), il est bon de se souvenir de la différence entre voyage pathologique et pathogène.

Un voyage pathologique, c’est quand la pathologie provoque le voyage. En clair, un mec se prenant pour Jésus décide de se rendre à Jérusalem pour se balader en toge. Un toxicomane se rend en Inde pour dégoter de la came pas chère et perdre un peu plus ses repères. Le voyage ne provoque pas le mal, c’est le mal qui provoque le voyage.

À l’inverse, un voyage pathogène est un voyage qui créé une pathologie. Dans nos exemples, c’est ce qu’on insinue. Une visite de Paris qui rend fou un touriste japonais. La vision de la Chapelle Sixtine qui provoque un dédoublement de la personnalité. Ces hypothèses sont remises en question par la communauté scientifique. Et il est important de rappeler que le voyage thérapeutique, celui qui guérit, est lui aussi possible.

 

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