Pass sanitaire : quel impact sur le tourisme et la culture ?
On a entendu un peu tout et n’importe quoi sur le pass sanitaire. Depuis et même avant sa mise en place, le 20 juillet dans les lieux de culture et le 9 août dans les restaurants, le pass attise toutes les passions.
Mais quelles sont réellement ses conséquences sur le tourisme et la culture ? Le pass sanitaire a-t-il vraiment un impact économique et social ? Voyons tout ça ensemble.
La peur des débuts
Le 20 juillet, le pass sanitaire entre en vigueur dans tous les lieux culturels accueillant plus de 50 personnes. La mesure gouvernementale vise à freiner la pandémie de COVID-19 et à encourager la vaccination. Pour entrer dans ces lieux, il est nécessaire de fournir une preuve de test négatif, de vaccin ou d’immunité au COVID-19.
Dès l’annonce de cette mesure, les premières inquiétudes apparaissent. Le 15 juillet, certains acteurs culturels criaient déjà à la « catastrophe » sur Sud Radio. À l’heure où le pass n’est encore qu’un projet, le Syndeac (syndicat des entreprises culturelles) demande à abandonner ce « nouveau coup d’arrêt au secteur culturel ».
L’inquiétude est compréhensible pour un secteur ayant subi 11 mois de fermeture. La culture est l’une des industries les plus touchées par les mesures anti-COVID. Le spectacle vivant a vu son chiffre d’affaires baisser de 43% en 2020. À Paris, les musées ont accueilli 55% de visiteurs en moins.
Une saison estivale menacée ?
Le tourisme est également perdant au jeu du COVID-19. On estime les pertes du secteur à 61 milliards d’euros depuis la crise sanitaire. Le 9 août, ce sont les restaurants et les bars qui ont vu entrer le pass sanitaire dans leurs établissements, souvent fréquentés par les touristes pendant l’été.
Pour les parcs d’attractions, l’été est une période charnière, représentant 80% de l’activité annuelle. La France dispose de 2 600 sites de loisirs, dont 90% ne comptent pas plus de 10 salariés. Malheureusement, il semblerait que les petites structures soient les plus fragiles face au pass sanitaire.
Le syndicat des parcs d’attractions accuse le gouvernement de ne pas prendre en compte les spécificités du secteur. Au moment de l’annonce, certains réclament un report de la mesure en septembre, d’autres souhaitent simplement conserver les règles de distanciation ayant fait leurs preuves, selon eux, l’été dernier.
Que reproche-t-on au pass sanitaire ?
Instauré très vite, le pass sanitaire a pris de court certains visiteurs, notamment étrangers. Ils sont arrivés sur le sol français, vaccinés, mais sans savoir qu’ils avaient besoin d’un QR code pour aller au musée. Beaucoup d’acteurs du tourisme et de la culture ont regretté ce manque de temps pour informer le public.
Certains se sont senti découragés devant les files d’attente plus longues lors des premiers jours du pass sanitaire. Les plans de dernière minute sont évidemment difficilement compatibles avec l’obligation de se faire vacciner ou d’avoir un test négatif.
La mise en place de cette mesure nécessite de nouveaux moyens. Du personnel pour les contrôles, des lecteurs de QR codes… Une vraie complication pour certaines structures n’ayant pas prévu ces changements d’organisation. Beaucoup de professionnels jugent le pass sanitaire comme étant une mesure injuste ou stigmatisante.
Les chiffres de l’été pour le tourisme
Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État chargé du Tourisme, prévoyait environ 50 millions de touristes cet été (contre 3 millions en 2020). La clientèle s’est révélé être de proximité, les Américains et Asiatiques étant les grands absents de cette saison estivale.
Le gouvernement est optimiste, rappelant que 94% des Français partis en vacances en 2020 sont allés en France. La tendance semble être au tourisme local, comme prévu en début d’année. Les réservations de dernière minute sont d’actualité, même si elles ont baissé après l’annonce du pass sanitaire.
À Paris, l’Office du Tourisme annonce entre 3 et 5 millions de visiteurs estivaux. Les hôtels de la région sont ceux qui souffrent le plus. Deux tiers ont fermé leurs portes en août. D’autres régions comme la Provence voient leur fréquentation exploser. Le bilan est donc mitigé.
Pour les aéroports, rien n’a vraiment changé. Ils étaient déjà soumis aux tests PCR ou aux attestations depuis le début de la crise. Le train semble lui aussi s’en sortir. Le PDG de la SNCF a annoncé un niveau de trafic quasi équivalant à 2019.
L’impact sur la culture et le divertissement
Pour le cinéma, la saison a été compliquée. La Fédération Nationale des Cinémas Français estime la baisse de fréquentation des salles à 50%. Elle réclame une aide d’urgence pour l’industrie et dénonce une « catastrophe industrielle ». Les ventes ont chuté malgré quelques films très attendus comme Fast & Furious, Black Widow ou Kaamelott.
Les parcs d’attractions ont eu peur, mais ne s’en sortent pas si mal. La baisse de fréquentation des premiers jours a été rattrapée les semaines suivantes. À la mi-août, l’activité semblait être revenue au niveau de 2019.
Même constat plutôt positif pour les musées qui annoncent des chiffres stables pour l’été. Le Louvre a subi une légère baisse (-17%) la première semaine du pass sanitaire, vite compensée. La proportion de visiteurs étrangers a augmenté pendant l’été. Le Musée d’Orsay et le Musée d’art moderne ne notent pas de baisse de fréquentation.
Pour ce qui est des restaurants, la clientèle semble s’adapter plus ou moins facilement à la nouvelle mesure. La première semaine du pass sanitaire, les restaurateurs ont subi une baisse d’activité de 80%. Environ 26% des professionnels du secteur annoncent un chiffre d’affaires supérieur à l’été 2019.
Que dit le gouvernement du pass sanitaire ?
Dès juillet, le gouvernement a promis d’être présent pour le secteur fragilisé de la culture. Plusieurs organisations ont saisi le Conseil d’État d’urgence pour demander l’annulation du pass sanitaire. À la même période, Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, a rappelé le montant du soutien public à la culture : 12 milliards d’euros.
Le 14 août, Roselyne Bachelot annonce que c’est « le pass sanitaire ou la fermeture ». Le 23 août, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, se félicite d’une augmentation de 15% de la consommation dans les restaurants durant la première quinzaine du mois. Pour lui, c’est la preuve que « l’économie est dans la bonne direction ».
Le 30 août, un nouveau point est fait entre Bruno Le Maire et les organisations patronales. Le ministre annonce la fin du fonds de solidarité au 30 septembre. Les restaurants, cafés, hôtels continuent de demander des aides et reprochent au pass sanitaire d’avoir causé leur forte baisse d’activité.
Bruno Le Maire, lui, estime qu’on s’en sort plutôt bien avec une augmentation de 5% des dépenses par carte bleue lors de la première semaine d’août. Il contredit les chiffres avancés par les professionnels et affirme que « le pass sanitaire n’a pas d’impact sur l’activité économique du pays ».
Le pass sanitaire : un sujet controversé
Plusieurs semaines après sa mise en place, le pass sanitaire provoque toujours de nombreuses controverses. Certains manifestent contre lui, d’autres regrettent la façon dont il a été mis en place, fragilisant des secteurs comme le tourisme et la culture.
Le pass sanitaire devrait rester dans nos vies (au moins) jusqu’au 15 novembre. Reste à savoir si les aides de l’État suffiront pour aider les industries à tenir le coup ou si la proportion de Français vaccinés sera assez grande pour booster la consommation.